Agression physique volontaire ou verbale, discrimination, harcèlement moral ou sexuel, agissements sexistes : à l’AP-HP comme ailleurs, la violence au travail est une réalité en hausse. C’est ce que dévoile la CME du CHU francilien en rendant public le rapport d’activité de la cellule centrale « violence au travail » de l’établissement.
Créé en 2021, ce dispositif signale et traite les situations de violence « intra-CHU » qui impliquent entre eux les professionnels de l’AP-HP (les cas en provenance de l’extérieur ne sont pas comptabilisés), les étudiants, les stagiaires, les prestataires et les bénévoles.
L’année 2024 enregistre une hausse du nombre d’alertes sans précédent, constate la cellule dans son rapport. Sur 278 cas remontés, le premier CHU de France en a jugé 258 recevables. C’est 130 % de plus qu’en 2023 et 200 % de plus en deux ans (87 signalements en 2022).
Une majorité de conflits et de violences à caractère moral
Plusieurs faits de violence peuvent être comptabilisés pour un seul signalement. La CME du CHU francilien constate en la matière un « maintien » des tendances générales d’une année sur l’autre. Les conflits et les violences à caractère moral représentent toujours l’immense majorité des violences (92 %).

L’enquête ne met pas en lumière un environnement plus propice qu’un autre à la violence entre les 38 hôpitaux qui composent le CHU. Les établissements du groupement hospitalo-universitaire (GHU) Nord de Paris, ceux du centre de la capitale et ceux dits de la Sorbonne représentent chacun un cinquième des plaintes. Ce sont aussi les trois groupements qui concentrent le plus de personnels (62 % en tout).
Cochin-Port Royal est le plus gros pourvoyeur de plaintes (28). À noter également que le GHU Paris Seine-Saint-Denis (Avicenne à Bobigny, Jean-Verdier à Bondy et René-Muret à Sevran) concentre 10 % des signalements pour 5 % des effectifs.
Ça balance entre médecins
Le profil du signalant « est le reflet fidèle de la démographie AP-HP », peut-on lire. Ce sont à 73 % des femmes et à 89 % des personnels non médicaux. Dans cette catégorie, aides-soignantes, infirmières et agents administratifs ont émis la moitié des signalements.
Parmi les médecins, 59 % des signalements émanent des PH et 14 % des chefs de clinique-assistants. Les universitaires et les étudiants ont moins tendance à rapporter des déclarations de violence au travail.
Côté agresseurs, les hommes et les médecins se démarquent (dans l’ensemble des personnels concernés). « Les hommes signalent moins (27 %) qu’ils ne sont signalés (40 % soit + 8 points par rapport à 2023). Comme l’année précédente, ils sont en proportion plus signalés que ce qu’ils représentent dans nos effectifs », note l’AP-HP. De même, les praticiens « sont sensiblement sursignalés (20 % du total) au regard de leur poids dans la population AP-HP (11 % en ne tenant compte que des seniors, 15 % en intégrant les internes-FFI ». Fait notable, les médecins se signalent presque exclusivement entre eux.
Toutes catégories confondues, les managers sont plus souvent la cible de déclarations pour des faits de violence. Un médecin signalé sur deux est ainsi chef de service ou responsable d’une unité fonctionnelle (UF). « Les griefs afférents à des décisions d'organisation vécues comme inéquitables, des décisions de gestion RH (validation de congés, évaluation-non renouvellement de contrat), ainsi que des pratiques managériales sont régulièrement au fondement des signalements », analyse l’AP-HP. Au total, ajoute-t-elle, « on peut considérer que dans plus de la moitié des signalements (52 %), il se joue une relation de travail caractérisée par une asymétrie des pouvoirs ».

Selon la nature et la gravité de la situation, les agresseurs s’exposent à un recadrage, à une sanction disciplinaire, à de la médiation, à une enquête interne, à une forme de conciliation, à un accompagnement individuel, etc. En 2024, 12 % des signalements ont donné lieu à l’ouverture d’une procédure disciplinaire. Et deux plaintes ont tout de même été suivies d’une saisine du Procureur.
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